La promesse du Multicloud va-t-elle au-delà de celle du Cloud Hybride ?

Alors que le cloud est devenu la norme dans l’organisation des systèmes d’information, le véritable enjeux n’est serait-il plus de migrer vers le cloud, mais plutôt de choisir le bon modèle d’exploitation ? Entre le cloud hybride et le multicloud, deux approches coexistent, avec des implications techniques proches, mais des enjeux stratégiques profondément différents.
Face à l’exigence croissante de performance, de sécurité, de souveraineté et de résilience, le choix d’une stratégie multicloud représente plus qu’une décision liées à une alternative technique. C’est désormais un levier de gouvernance, d’optimisation et de pilotage des risques à l’échelle de l’entreprise.
Quelle différence majeure entre une stratégie Multicloud et le Cloud hybride ?
Le cloud hybride repose sur une intégration maîtrisée entre cloud privé et cloud public. Il s’adresse particulièrement aux organisations souhaitant conserver une partie de leur IT sous contrôle direct, tout en accédant à la flexibilité du cloud public.
Le multicloud, lui, suppose l’usage de plusieurs fournisseurs de cloud public, avec ou sans cloud privé, et sans exigence d’interopérabilité immédiate entre ces environnements. Il repose sur une logique d’arbitrage stratégique : associer chaque usage métier au fournisseur ou service cloud le plus pertinent.
La distinction n’est donc pas purement technologique. Elle est surtout structurelle et décisionnelle :
- Le cloud hybride vise une continuité d’infrastructure avec des logiques d’externalisation ;
- Le multicloud incarne une politique de diversification, de spécialisation et d’optimisation.
Pourquoi le multicloud est devenu un sujet central pour les entreprises ?
1. Réduction des risques de dépendance fournisseur
Le multicloud permet d’éviter une dépendance critique à un unique prestataire, notamment en termes de coûts, de disponibilité, de règles contractuelles ou de localisation des données. Il offre aux DSI une marge de négociation accrue et une plus grande résilience opérationnelle.
2. Optimisation des coûts et des performances
Chaque fournisseur cloud excelle dans certains domaines : traitement de données massives, intelligence artificielle, analytics, machine learning, conformité réglementaire, etc. En combinant plusieurs clouds, l’entreprise bénéficie du meilleur de chaque plateforme selon ses besoins métiers. Cela devient un avantage concurrentiel, à condition de piloter finement les coûts (via une approche FinOps).
3. Souveraineté, conformité et géopolitique du cloud
La géopolitique du numérique influence de plus en plus les décisions cloud. Le multicloud permet de répartir ses données et ses applications selon des critères de souveraineté (cloud de confiance, RGPD, hébergement local, certifications, etc.) et de limiter les risques juridiques ou réglementaires.
4. Accélération de l’innovation métier
En libérant les équipes IT des contraintes d’un fournisseur unique, le multicloud permet une expérimentation plus rapide de nouveaux services cloud (API, IA, serverless, edge computing…). Cela soutient une approche agile, DevOps ou produit, centrée sur la création de valeur rapide pour le métier.

Une stratégie multicloud impose une nouvelle gouvernance IT
Le multicloud ne se décrète pas il s’organise. Par conséquent, cela demande aux DSI une évolution en profondeur de leur gouvernance IT :
- Pilotage des contrats et des SLAs multipartenaires
- Orchestration des charges de travail entre environnements hétérogènes
- Gestion unifiée de la sécurité, des identités, et de la conformité
- Interopérabilité et portabilité des applications (via containers, Kubernetes, etc.)
- Mise en place d’outils de monitoring, de FinOps, de Cloud Management Platforms (CMP)
- Intégration d’une stratégie et d’une solution d’observabilité pour anticiper, diagnostiquer et optimiser vos systèmes IT
Le multicloud renforce donc le rôle stratégique de la DSI dans l’entreprise. Elle ne se contente plus d’opérer l’IT. Elle arbitre, gouverne, choisit et négocie dans un environnement multi-acteurs.
Vers une architecture pensée par cas d’usage
Adopter une stratégie multicloud, c’est aussi changer d’approche : penser le cloud par cas d’usage et non par infrastructure. On ne conçoit plus l’IT comme un bloc unifié, mais comme un portefeuille de services distribués, alignés sur les besoins métiers. Par exemple :
- Un système RH peut être hébergé sur un cloud offrant des garanties de souveraineté ;
- Une application e-commerce en retail, pourra bénéficier des outils d’IA ou de recommandation d’un autre cloud ;
- Une plateforme marketing s’appuiera sur des services de traitement temps réel, plus performants sur un troisième.
Ce modèle d’architecture best-of-breed permet de mieux aligner les capacités techniques avec les priorités business.
Le multicloud permet d’adapter l’IT à la diversité des besoins métiers
Le multicloud ne remplace pas le cloud hybride. Il est une réponse stratégique à la complexité croissante des systèmes d’information modernes. Il permet d’adapter l’IT à la diversité des besoins métiers, d’optimiser les investissements cloud, et de gagner en agilité face aux évolutions du marché.
Plus encore, il prépare les entreprises à un monde post-infrastructure, où l’enjeu n’est plus de construire un socle technique unifié, mais de piloter intelligemment un écosystème numérique distribué.
Selon Gartner, d’ici fin 2025, 70 % des grandes entreprises devraient avoir adopté une stratégie multicloud structurée. La question pour les DSI n’est donc plus « faut-il y aller ? », mais comment aligner ce modèle avec les objectifs business de l’entreprise.